Nous
arrivons au terme de la vie de nos centrales nucléaires. En dehors
de l’insurmontable problème du legs aux générations futures de
la gestion de déchets radioactifs d’une durée de vie de 200 000
ans – et de son coût -, de notre incapacité actuelle à gérer le
démantèlement d’une centrale nucléaire, nous allons prolonger la
durée de vie nos centrales de 10 ans renouvelables* à très grand
frais** sans pouvoir garantir qu’il n’y aura pas de problème. Et
alors que nous sortons d’une décennie de sous-investissements dans
le parc par EdF.
Malgré
les communications optimistes des acteurs de la filière, la
situation actuelle est au plus bas. Les travailleurs sous-payés des
entreprises sous-traitantes sont les premiers exposés*** :
conditions de travail, rythme accéléré pour terminer le chantier
au plus vite (période d’arrêt du réacteur hors hiver du fait de
la demande pour le chauffage électrique), exposition à la
radioactivité. Les questions de formations, de santé et de sécurité
se posent. L’expertise des travailleurs du nucléaire d’EdF
disparaît au fur et à mesure des départs à la retraite.
Les
logiques financières actuellement à l’œuvre, qui prévalent au
recours des sous-traitants, peuvent nous faire craindre que nous
sommes entrés dans une période de grand rafistolage.
Or
tout incident aura des conséquences dramatiques et générera des
coûts de réparation astronomiques, si tant est que l’on puisse
parler en termes de réparation. Les premiers touchés seront
les travailleurs du nucléaire, les personnels de la sécurité
civile et bien entendu dans un temps très court les populations, les
animaux ainsi que les terres cultivables. Les deux dernières
catastrophes nucléaires le confirment. Tout incident ne serait pas
anodin.
Pour
information, ci-dessous, une lettre de la Confédération
générale du travail du Japon qui explique comment le gouvernement
japonais compte procéder pour financer les conséquences de
l’incident de Fukushima tout en évitant au fournisseur
d’électricité nucléaire de faire faillite. Déjà, toute
proportion dramatique gardée, nous suivons cette même logique. Les
surcoûts du « grand carénage » (déjà plus du double
du coût annoncé), nous les paierons comme nous payerons les
conséquences du moindre incident.
Nous
devons nous éloigner des rêves fous de prolongation de durée de
vie des réacteurs ou sortir de toute logique qui viserait à
substituer de nouveaux réacteurs aux anciens. Nous devons sortir de
cette stratégie industrielle qui n’a jamais été soumis à un
débat démocratique depuis 50 ans.
Nous
devons accélérer la transition énergétique tout en garantissant
le droit à l’énergie pour tous. Une politique de sobriété
électrique est le premier jalon à mettre en œuvre pour réduire la
demande globale. Nous pouvons y arriver et cela passera par :
-
un plan de la rénovation thermique de l’habitat
-
un plan de développement des énergies renouvelables
- un
pôle public de l’énergie afin de mettre la filière à l’abri
des logiques financières et d’en aménager la maîtrise publique
et citoyenne
-
une action pour la création d’un groupe public européen en
matière d’énergie
La
logique européenne doit se situer dans une logique de coopération
et de mutualisation plutôt que de concurrence.
Pierre-Yves
Pira
*étrangement
la durée de vie annoncée est passée officiellement de 25 à 30
puis à 40 ans. EdF a annoncé une volonté d’aller au-delà, 50
voire 60 ans. Sans demander au français ce qu’ils en pensent.
** «
le grand carénage » , qui consiste à remplacer certains
éléments vitaux de sécurité, coûtera plus de 100 milliards selon
la cour des comptes (février 2016) au lieu des 55 annoncés par Edf.
Mais il est impossible de remplacer l’élément essentiel d’un
réacteur : sa cuve
*** la
Fédération CGT de l'énergie : "voilà
plus de 10 ans que la Division de la Production Nucléaire (DPN) a
fait le choix d’externaliser la maintenance des arrêts de tranche
à hauteur de 80 %... sans se préoccuper des conséquences ni sur la
vie des personnels ni sur l’état réel de l’outil de production
". Les sous-traitants de l’industrie nucléaire subissent 80 %
de l’exposition à la radioactivité sans suivi médical adéquat.
Ils dénoncent la dégradation de leurs conditions de travail et
cadences insoutenables qu’ils subissent ainsi que la mie en cause
de la sécurité.
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